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23 juillet 2010 5 23 /07 /juillet /2010 20:02

Prologue.

 

La route défilait sous mes yeux tel un long serpent brillant. Brillant de l'averse qui se prolongeait de plus en plus, m'obligeant à voir à travers le battement régulier et interminable de mes essuie-glaces. Je me sentais dans cet état ou l'on n'a plus envie de s'arrêter de rouler, ou l'on voudrait que la route continue à jamais, qu'aucune destination finale ne s'ouvre à nous. J'aimais la route, je lui collais au corps, ne faisant presque plus qu'un avec elle, épousant chacune de ses formes épurées, chacun de ses défauts, glissant de plus en plus vite vers une fin probable.

La musique de l'autoradio tentait tant bien que mal de rivaliser avec le son de la pluie qui battait sur l'habitacle, je ne voulais de toute façon plus l'entendre, je ne pouvais plus l'entendre, trop occupé à faire l'amour au bitume.

 

Et je pensais, je pensais à celui qui hantait mes cauchemards et mes rèves. Celui qui par sa seule présence pouvait me faire taire, le seul face à qui je me sentais en danger. Celui qui puait l'arrogance, la suffisance mais aussi l'intelligence.

Pas la même intelligence que moi, pas l'intelligence des gens respectables. Une intelligence froide, vicieuse, pleine de perversion et de sadisme.

Celui qui avait fait de moi en l'espace de quelques mois un addict à tous les réconforts, à toutes les issues que mon esprit pouvait trouver. Oui je pensais à lui, à nos disputes, surtout à nos disputes. Dire qu'il avait été mon ami... Et un jour, il avait changé, ou il avait dévoilé ce qu'il était vraiment, je ne le saurai jamais. Un jour il m'avait rejeté, sali, poussé dans une introspection interminable, me faisant porter le chapeau pour tellement de choses ignobles qu'il m'avait dites. Peu à peu je sombrais, et il me maintenait la tête de plus en plus profond sous la surface de l'eau. Il m'avait fait tomber la tête la première dans la neige et me noyait à présent dedans. Par un simple regard échangé dans cette soirée où il n'aurai pas du être présent.

 

 Un simple regard, on peut me tuer d'un simple regard alors? Quel amer constat, quelle ironie, moi qui ait toujours travaillé à être le plus fort et qui ait toujours réussi à être impénétrable, imperturbable, William avait réussi à me tuer d'un seul coup d'oeil. En une fraction de seconde, il n'avait même pas ouvert la bouche, il avait fait fondre en moi ce qu'il restait de volonté et d'amour propre, d'humain.

 

Je me vengerai, je me vengerai de ce mal que tu m'as fait, de la façon dont tu m'as plongé dans le doute et dans la quasi-mort, me suis-je alors promis silencieusement. Oui, je deviendrai aussi implacable que la foudre, je viendrai et te frapperai au coeur, si tu en as encore un.

 

Je me vengerai de ton corps sur le mien, je me vengerai de ta pensée sur la mienne. Je me vengerai.

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Plus tard, je serai... Delirium homine.

 

La nuit est devenue noire, la ville s'est tue. Au loin quelques voitures, un train qui part, emportant peut-être des gens qui ne le voudraient pas. Au abords de la gare une silouhette semble endormie. C'est surement un ivrogne qui lassé de boire a décidé de s'abandonner au sol. La rosée du matin commence a perler sur mes joues, cela fait plusieurs heures que je regarde la ville, assis à la même place. Demain dès l'aube elle reprendra toute son insouciance de la veille, mais pas moi. Trop de choses se sont passées dans la ville avant que les ténèbres n'emportent tout.
J'envie l'amnésie nocturne de la cité, j'envie les rues qui la nuit sont lavées des actes du jour par l'obscurité, j'envie les citadins qui, contrairement à moi, parviennent a dormir. Cette insomnie me semble durer depuis des siècles. Je me sens si petit, si insignifiant, si important pourtant. Mon indignation ne s'efface pas, ma tristesse non plus, qu'est-ce qui cloche avec moi? Cigarette, briquet, flamme, fumée, je reprend. Qu'est-ce qui cloche? Pourquoi j'ai l'impression d'être enfermé dans le passé de ce petit jardin derrière moi? Effet spécial: je crache ma fumée. Pourquoi tout ici m'oppresse? Pourquoi, pourquoi, pourquoi?

L'ivrogne a bougé, il se relève et va s'asseoir sur un banc. Un homme louche passe près de moi. Il me propose de la came, je l'envoie chier, il me prend la tête, je tourne le regard et crache ma fumée. Il part dérouté par mon silence, j'ai pas que ça a faire de lui fournir des thunes que je n'ai pas. Fumée, mégot, lancer, touché, coulé, dans les égouts.
La ville semble retenir son souffle pour le plongeon ultime, tout est désert, bon l'ivrogne est toujours là, mais on entend plus un seul bruit. On pourrait croire que tout le monde est mort. Non, je me trompe, personne n'est mort, ils avancent dans le futur et moi je reste enfermé dans le passé. Je reste enfermé dans le présent de la nuit, je refuse d'oublier. Je refuse d'avancer au même rythme que les autres, laissez moi pourrir dans mon passé. J'vais crier... Non j'ose pas ça résonnerait trop, puis tout le monde est en train d'avancer j'veux pas les déranger, j'veux pas qu'ils me dérangent.

 

Cigarette, briquet, flamme, fumée, c'est bon de fumer quand personne n'est là pour dire que c'est pas bien de le faire, je sais que c'est pas bien, j'avance pas aussi vite que vous c'est tout, je m'en rendrai compte plus tard. La ville aussi elle fume, c'est beau un lampadaire entouré de fumée.
La nuit continue, l'avantage des insomnies solitaires c'est qu'on a l'impression de vivre dans un rêve. On va dehors quand il fait nuit, et on ne voit jamais la fin, on finit toujours par s'endormir. Mais cette fois, je ne m'endormirai pas, je veux voir ce moment ou le Soleil chasse tout ce que la nuit a essayé de construire, ou le Soleil crame mes espoirs de ne pas avancer. C'est le sommeil qui est redoutable, il m'empêche de continuer dans ma lancée de rester dans le passé. Alors je ne vais pas dormir et je vais regarder le soleil en face. Fumée, rond, tapage du filtre, cendre, c'est bon je reprend.

Il fait toujours nuit, on entend toujours aucun bruit, je n'ai toujours pas bougé, l'ivrogne non plus, ma cigarette se consume lentement, j'en ai encore quelques unes, j'ai envie de faire du violoncelle. Ça y'est on a passé le cap fatidique: Je suis sur les nerfs, je n'ai pas dormi depuis plus de 15h, je n'ai pas mangé depuis a peu près le même laps de temps. J'ai envie de pleurer, je pleure pas, si je pleure après je vais être fatigué, faut pas que je dorme, faut pas que je dorme...
Le soleil se lève, il fait gris, il fait bleu foncé, il fait jour. Je me lève, putain je suis engourdi, j'allume encore une clope, juste pour le style. Je le regarde en face, il brule mes yeux. Rien. Connasses d'insomnies.

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