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1 décembre 2013 7 01 /12 /décembre /2013 23:50

Tu étais là. Juste à portée de ma main tendue, tendue maintenant vers un abîme que la fierté seule ne saurait combler. 





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La journée était passée vite, si vite qu'il n'avait semblé s'écouler qu'une petite heure de l'aurore au crépuscule. La journée avait été si froide, si grise. Une vraie journée de fin d'automne, une de celles que l'on aimerait ne pas avoir vécues. Etendu dans la pièce s'assombrissant de minute en minute, j'imaginais le morne coucher de soleil, que je ne distingais évidemment pas à travers l'épaisse couche de nuages, et que je n'aurais même pas eu envie de regarder de toute façon. Si seulement. Si seulement le vent avait pu, en cet instant, faire battre les battants des volets contre les murs de pierre et donner une symphonie de mugissements et de tremblements de feuilles mortes, si seulement la pluie pouvait venir fouetter la vitre, fouetter mon front brulant, mon front fiévreux, mon âme enfievrée. 
Je tenterais bien de redescendre un verre de cet affreux spiritueux que j'avais trouvé dans le fond d'un placard, mais rien que l'idée de devoir bouger me foutrait la nausée. J'aurais bien allumé une autre cigarette aussi, pour faire passer le goût de l'affreux spiritueux, âpre encore sur mon palais. Mais la seule idée de devoir bouger me terrasserait plus vite qu'elle n'aurait fusée.


Mettre de l'ordre, tout était parti de ça. Mettre de l'ordre, dans ma vie, dans ma tête. Quelle triste idée que j'avais eue là, quelle inconscience. Qu'est-ce que remettre de l'ordre? Se déclarer adulte? Montrer qu'on exerce toujours un contrôle de soi? Montrer qu'on en est seulement capable, de se contrôler? Foutaises. J'aurais pas du, j'aurais jamais du. Après tout, si personne n'était jamais venu se plaindre de mon désordre, pourquoi est-ce que j'aurais eu besoin de le changer?
Mais ça c'était l'avant. Avant. Quand toutes les choses pouvaient encore être reliées entre elles, et que moi je n'avais qu'à tirer telle ou telle ficelle pour ne faire que dénouer un noeud de possibilités, de choix, un arbre des possibles à la simple portée de mon esprit. Seulement, à l'innocence succède la bêtise profonde, aux amours innocentes succèdent les perversions.
Alors j'étais toujours là, toujours étendu, toujours à même le sol, toujours dans ma pièce, noire maintenant que le soleil avait semblé définitivement disparaître, livré aux affres de la nuit. Et je me souvins de toutes ces autres nuits passées à guetter une étincelle, un rayonnement, une illumination qui permettrait de tout régler. Etrange. Il y a bien longtemps que ça n'était plus arrivé, il y a bien longtemps que les solutions ne me tombaient plus par miracle entre les mains. Du moins, pas mes solutions. Des solutions pour les autres, ça oui, j'en avais des masses. Des solutions pour ma pomme... Ça c'était une autre histoire. Quels mots, quels maux?



Je finis tout de même par trouver la force de me relever et de m'adosser au mur, tâtonnant autour de moi quelques instants avant de saisir du bout de mes doigts un paquet de cigarettes. Et cet affreux spiritueux, il n'était pas si affreux après tout, au point où j'en étais, je pouvais bien faire une croix sur ma répugnance pour les Pur Malt vieillis en fûts de chênes. Crétin que j'étais, pas foutu d'apprécier les petites choses. Voilà, déjà un problème de résolu, me dis-je, je ne sais pas me contenter de peu. A quoi bon se contenter de peu? Qu'est-ce qu'une vie sans la frustration de n'avoir pas eu ce que l'on désirait? Il me faudrait un jour trouver la réponse à cette sempiternelle question.

  J'écarte de ma main une mèche de cheveux qui barre mon visage, ma nudité ressort blafarde, contrastant avec les moirures grises et noires de mon antre. Pris d'un sursaut de colère, j'écrase ma clope sur mon bras, ça grésille. Mes dents se crispent. Tant pis. Ça fait fichtrement mal, ça pue, et c'est totalement bête, je le sais. Mais ça m'a réveillé, du moins, ça m'a fait me sentir vivant, un peu. Alors je me remets à penser. Penser à ces regards fiévreux échangés quelques jours plus tôt. Ou étaient-ce des semaines? Peu importe. De toute façon, ça ne mène à rien des regards fiévreux. 

 

Penser à ces caresses furtives, à ces entremêlages de peaux? Les aurais-je fantasmés? Depuis combien de temps suis-je enfermé? Depuis combien de temps déjà... Si seulement je parvenais à m'en souvenir, si seulement mon geôlier n'était pas si cruel ni emmuré dans son éternel mutisme. Alors je saurais.
Mais je suis emmuré pour mon propre bien, à en croire ce que je laisse transparaître. Deuxième éclat de colère, la bouteille de Whisky vient de se fracasser contre le mur et je me sens aspergé de gouttes tièdasses qui me brûlent les yeux et qui dégoulinent sur mon torse, sur mon sexe et entre mes cuisses. Je sens la violence m'électriser, encore, sous-jacente sous mon épiderme. Je suis dangereux. Je me sens dangereux en tout cas, je me sens lion dans sa cage et ma chair est à vif, j'appelle à la vengeance. Je vois noir. Je vois le noir, par la fenêtre, et celui-ci me pénètre de plus en plus profondément.  

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